L’impact du sommeil sur les performances

Ce mois-ci, le Royal Ballet est de retour sur scène. Gregor Rosenkranz, préparateur physique du Royal Ballet, nous parle de l’entraînement pendant le confinement, du rôle du sommeil sur les performances et de la préparation des danseurs avant de retrouver la scène.

Q1. Comment le sommeil affecte-t-il les performances d’un danseur classique professionnel (sur scène et pendant les répétitions), du point de vue physique et mental ?

Chez un danseur, le manque de sommeil peut se traduire de diverses façons, aussi bien pendant les répétitions qu’au cours des spectacles. Il peut s’agir de réactions plus lentes, d’amoindrissement de la vivacité, d’altération de la concentration, de la mémoire et de l’apprentissage, de diminution des fonctions immunitaires et neuroendocriniennes, de douleurs ou d’inflammations, etc. Il en résulte des performances de moindre qualité.

Q2. Que recommandez-vous aux danseurs professionnels pour les aider à optimiser leurs performances ? Combien d’heures de sommeil, ce qu’il est préconisé (ou non) de boire ou manger avant le coucher, quelle posture pour dormir, quelle routine matinale ?

Pour bien récupérer, nous recommandons aux danseurs 8 heures minimum d’un sommeil de qualité. Des études menées auprès d’athlètes montrent que 10 à 12 heures de sommeil seraient bénéfiques. Cependant, en raison des emplois du temps chargés des danseurs professionnels (représentations le soir, cours le matin), cela n’est pas toujours possible. Il est par conséquent important d’avoir une bonne hygiène de sommeil, c’est-à-dire de respecter des horaires réguliers pour le coucher et le lever, de proscrire les écrans lumineux (téléphone, tablette, ordinateur, télé) 30 minutes au moins avant le coucher, de dormir dans une pièce sombre et fraîche (environ 18°C) et d’éviter la caféine ou tout autre stimulant avant d’aller dormir.

Q3. Quels conseils avez-vous donnés aux danseurs pendant le confinement pour les aider à rester au mieux de leur forme ?

Pendant le confinement, nos danseurs ont bénéficié chaque semaine d’un grand nombre de séances d’exercices en direct (Pilates, yoga, préparation physique, cours de ballet) adaptées aux outils à leur disposition. Divers programmes individuels ont également été mis au point pour faciliter l’adaptation cardio-vasculaire et l’effort continu. Comme c’était déjà le cas sur place, les danseurs blessés ont bénéficié de programmes de rééducation personnalisés. De plus, un très généreux ami du Royal Ballet a fait livrer au domicile de chaque danseur un revêtement de danse en vinyle, afin qu’ils puissent s’entraîner plus facilement chez eux.

Q4. À la réouverture du Royal Opera House, comment les danseurs se prépareront-ils à revenir sur scène ? En matière de sommeil, seront-ils amenés à changer leurs habitudes, à dormir plus longuement ? Devront-ils modifier leur routine ?

Maintenant que nous avons réinvesti les lieux, nous préparons nos danseurs pour le premier spectacle en sept mois de la compagnie au complet. The Royal Ballet: Back on Stage est un spectacle exclusif diffusé en direct le 9 octobre en pay-per-view sur www.roh.org.uk au prix de 16 livres (environ 19 euros).

Chaque jour, les danseurs suivent également des cours de danse classique, répètent et s’entraînent physiquement, notamment lors de séances de renforcement et de conditionnement. Malheureusement, lorsque nous reprendrons à plein temps, leur emploi du temps ne leur permettra pas de s’octroyer des heures de sommeil supplémentaires. Là encore, compte tenu de leur charge de travail, nous leur recommandons 8 heures minimum d’un sommeil de qualité, dès que cela est possible. Dans le cas contraire, nous conseillons une sieste de 30 minutes maximum dans la journée, à condition de la faire avant le milieu de l’après-midi pour ne pas perturber les habitudes de sommeil.

Q5. Il peut arriver à certains danseurs de ressentir une montée d’adrénaline après une représentation. Quelles sont les répercussions sur leur sommeil ? Qu’est-il recommandé de faire dans ce cas ?

L’un des éléments à considérer est le rythme circadien. Les danseurs s’adaptent à leur planning journalier. Leur conseiller de se coucher lorsqu’ils ne sont pas fatigués ne les fera pas dormir plus longtemps. Cette désynchronisation forcée de l’horloge interne et la crainte de ne pas dormir suffisamment du fait de se sentir éveillé risquent même d’avoir l’effet contraire. S’il y a une montée d’adrénaline après la représentation, certaines stratégies comme la relaxation progressive des muscles, la méditation ou la lecture peuvent aider à se détendre avant d’aller se coucher.

Q6. La danse classique étant extrêmement exigeante du point de vue physique, le bien-être des danseurs professionnels repose sans doute sur plusieurs éléments fondamentaux. Quels sont ces éléments ? Quelle est la place du sommeil ?

L’essentiel est de trouver un bon équilibre entre travail et récupération.

Les stratégies de récupération qui permettent aux danseurs de se maintenir longtemps au meilleur niveau s’appuient sur différents outils. Certains peuvent être maîtrisés par les danseurs eux-mêmes, d’autres nécessitent une assistance de notre équipe chargée de leur santé. Pour moi, les plus importants sont, dans l’ordre :

1) sommeil, 2) hydratation et 3) besoins nutritionnels élémentaires.

Ce n’est que lorsque ces trois éléments sont réunis que l’on peut commencer à envisager d’autres stratégies de récupération, comme les vêtements de compression, les massages, les bains alternés, différentes stratégies nutritionnelles, etc. Le sommeil est le principal facteur d’aide à la récupération et aux performances.

Q7. Suggérez-vous un autre rythme de sommeil pour ceux qui récupèrent d’une blessure ? Si oui, lequel ?

Lorsqu’un danseur est mis à l’arrêt à cause d’une blessure, il a l’opportunité d’augmenter son temps de sommeil. On recommande de renforcer l’apport énergétique pendant la rééducation, et il en va de même pour le sommeil.

Q8. En matière de sommeil, les conseils sont-ils différents pour les danseurs que pour les sportifs ou d’autres athlètes professionnels ?

Pas nécessairement. Le métier de danseur classique est extrêmement physique. De fait, au sommet de leur art, ils peuvent danser jusqu’à 8 heures par jour, 6 jours par semaine. Par conséquent, les recommandations sont les mêmes que pour des sportifs de haut niveau. C’est-à-dire 8 heures minimum d’un sommeil de qualité, et plus si possible (10-12 h).

Q9. Vos conseils seraient-ils très différents pour des sportifs amateurs, mais dévoués à leur sport ? Par exemple, des personnes qui prépareraient un marathon, etc.

Pas vraiment. Que l’on soit professionnel ou non, plus le niveau de performances est élevé, plus le besoin de récupérer est important. Dans le sport de haut niveau, on peut avoir la possibilité de mieux structurer ses journées et de les planifier pour disposer de plus d’heures de sommeil.

Un marathonien amateur aura peut-être plus de mal à concilier travail à plein temps, famille, amis, entraînement et 8 heures de sommeil minimum.

THE ROYAL BALLET: BACK ON STAGE, le 9 octobre à 19h30, 16 livres (environ 19 euros) par foyer, disponible pendant 30 jours sur le site web du Royal Opera House. Pour plus de précisions, rendez-vous sur https://www.roh.org.uk/tickets-and-events/the-royal-ballet-back-on-stage-details

L’an dernier, en automne, Savoir a lancé une nouvelle campagne publicitaire mettant en scène de grands danseurs et danseuses classiques du Royal Ballet de Londres. Le danseur étoile, Steven McRae, et la première danseuse, Elizabeth Harrod. Pour en savoir plus sur cette campagne, lisez notre article « Une vie sans précipitation ».